Free To Play – Suite et fin
Cette semaine, suite et fin du mini dossier que j’ai commencé sur le free to play. Comme systématiquement, il y aurait bien plus à dire que les quelques lignes que j’ai pu écrire, et libre à vous de creuser le sujet si ça vous chante ! Pour un néophyte du genre, ça aura au moins eu le mérite de renseigner sur ce modèle économique qui offre désormais une réelle alternative aux jeux payants. On va donc conclure sur un jeu que j’ai trouvé tout aussi plaisant que LoL, et sur lequel j’ai aussi passé pas mal de temps : Dungeons & Dragons : Neverwinter. A la différence que cette fois-ci, c’est le modèle économique qui m’a fait arrêter le jeu.
Vous commencez à avoir l’habitude, vous allez avoir droit à la petite présentation de rigueur. Donc, Neverwinter, un MMORPG typé action développé par Cryptic Studio – que vous connaissez peut être pour la très agréable série des Torchlight – de 2013. L’éditeur a ici son importance, puisqu’il s’agit de Perfect World Entertainment. Si ça ne vous dit rien, sachez qu’il s’agit d’une grosse boite chinoise spécialisée dans les MMO typés asiatique, à l’origine d’une petite quinzaine de titres et qui surtout dispose du droit d’édition exclusif de DotA 2 en chine. Pas n’importe qui donc. Le jeu devait à la base être un MMO coopératif (de Cryptic Studio toujours), mais suite au rachat de Cryptic par Perfect World, et quelques déboires avec Wizard of The Coast (détenteur de la licence Dungeons & Dragons) et Atari (alors détenteur des droits d’exploitation de la licence) , le jeu a fini par sortir bien plus tard que prévu, et en ayant complètement changé d’angle. En bref, un beau bordel, un jeu qui a pris un paquet un de retard, qui a changé d’éditeur en cours de développement, et qui a subi un changement total d’orientation. La routine quoi.
L’affaire était intéressante à suivre pour quiconque s’intéresse de près ou de loin à la licence Dungeons & Dragons, puisque le nom « Neverwinter » dispose d’une certaine aura, en raison de deux très bons titres, et aussi parce que derrière, au loin, le spectre de Baldur’s Gate plane. J’ai été plus que sceptique quand le changement d’éditeur a été annoncé, une boite chinoise pour éditer la plus grosse licence de jeu de rôle occidental, une petite partie de moi est morte. Du coup, j’ai commencé à y jouer que bien après sa sortie, un après-midi ou j’avais vraiment rien à faire. Et après tout, qu’est-ce que j’avais à perdre ? A l’instar de Barnabé, j’ai beaucoup trop de temps de libre. J’ai été très agréablement surpris. Malgré une création de compte plutôt fastidieuse, je me suis assez rapidement retrouvé devant l’écran de création de personnages, et là, bin pas de doute : j’étais bien sur du D&D. Adaptation très libre de sa 4ème édition (qui, chose amusante est, elle-même, très inspirée des mécanismes des MMORPG de la génération WoW… lisez donc mon post sur les adaptations tiens !), on est tout de même plongé tête la première dans l’univers des Royaumes Oubliés. Graphismes chatoyants, intro et tutoriel efficaces, gameplay ultra accessible, pas de doute, on est bien face à un jeu gratuit qui veut se vendre. Le jeu a d’ailleurs reçu des critiques plutôt positives de la part de la presse. Forcément, c’est au niveau du end-game que ça chie dans la colle… je reviens là-dessus un brin plus tard.
La phase de progression est étonnamment rapide, presque trop. Les niveaux s’enchainent avec une facilité déconcertante, les points d’expérience pleuvent tant et si bien qu’on finit par atteindre assez rapidement le niveau maximal, sans avoir eu recours à la moindre potion d’XP du cash shop. Mis à part quelques features disponibles en avance par ceux qui ont payé un des nombreux pack disponible dans la boutique, l’intégralité du contenu du jeu est accessible gratuitement. On est bien loin des habitudes plutôt grindy des MMO asiatiques, et ça fait du bien. Quelques donjons, les premiers loots épiques de niveau maximal arrivent, décidément, je vais peut-être y jouer à ce jeu ! Et c’est là qu’on commence à déchanter. Mon premier contact avec le cash shop s’est fait très peu de temps après être arrivé au niveau maximum, et avoir obtenu mes premiers loots. Et c’était le bordel. Explications en détails :
Il existe 3 monnaies différentes dans le jeu :
– les pièces d’or que vous récupérez en tuant des monstres, et en faisant des quêtes. Elles ne servent absolument à rien si ce n’est à acheter des clés pour ouvrir des coffres, et un petit peu pour le système d’équipement.
– les ZEN, il s’agit de la monnaie virtuelle du cash shop, avec laquelle vous pourrez acheter absolument tout ce que vous voulez : cosmétique, re-spécialisation, montures plus rapides, compagnons, outils de craft, espace d’inventaire… Ils ne peuvent pas s’obtenir en jeu (en fait, si, explication après)
– Les Astral Diamonds, la véritable monnaie du jeu, celle qui est utilisée pour acheter et vendre tous les objets que vous trouverez dans les donjons, elle est la monnaie utilisée dans l’autel des ventes du jeu.
Le hic c’est que pour obtenir des diamants, il n’y a que deux solutions. Soit via un système d’échange ZEN ↔ Diamants à taux variable, soit en quantités infimes via des quêtes journalières, et un métier. La perméabilité du système est plus que discutable, puisqu’avec de l’argent réel il est donc possible d’acheter n’importe quelle pièce d’équipement disponible aux enchères. Et on parle d’un jeu où les objets sont en très grande majorité liés quand équipés (tout ce que vous trouvez dans les donjons, vous pouvez donc le vendre à d’autres joueurs). Si le système s’arrêtait là, pourquoi pas. Un joueur patient pourrait s’équiper uniquement en enchaînant les donjons, ou en faisant du PvP, comme je l’ai fait. Et c’est là que ça devient très vicieux.
Ici, vous pourrez échanger vos sous, contre des diamants astraux (la monnaie du jeu). A titre d’exemple, un pack de 3000 zen c’est 25 euros.
J’ai parlé de compagnons un peu plus tôt, ces derniers disposent d’un certain nombre de slots où vous pouvez équiper des runes pour obtenir des bonus passifs. Ces dernières s’étalonnent sur 9 rangs différents. Quand je jouais, le rang maximum que l’on pouvait looter était 4. Ensuite il fallait fusionner 4 runes pour en obtenir une d’un niveau supérieur, donc 4 de niveau 4 pour 1 de niveau 5, 4 de niveau 5 pour une 6, etc. Le tout avec des chances d’échec (vous avez 90 % de chance d’échec pour passer du 8 au 9), et le risque de perdre vos composants. Sauf si vous payez. Les compagnons existent en différentes versions, certaines bien plus puissantes que d’autres. Vous ne pouvez avoir accès qu’à trois compagnons différents quand vous jouez, tous d’un rang assez faible. Sauf si vous payez.
Allez, ok, le PvE dépend énormément des compagnons et de leurs caractéristiques, pas grave, en PvP on a pas de compagnon. Sauf que chaque arme et armure de notre inventaire dispose elle aussi d’un slot d’enchantement. Comment ça marche ? De manière tout à fait similaire, pour la somme de 10 dollars vous pouvez vous assurer que l’enchantement défensif que vous avez ne risque pas de se détruire, et ait 100 % de chance de réussir à s’améliorer. Ces enchantements (notamment pour arme et plastron) ne se lootant que sur les boss sous la forme de… fragments. Avec 4 fragments vous aurez 1% de chance de réussir à obtenir un enchantement. Cerise sur le gâteau, vous n’obtiendrez qu’une version « lesser », il existe bien évidemment 2 paliers d’amélioration au-dessus. A titre purement informatif, en admettant que vous ayez 64 fragments du même enchantement (je me suis reconnecté à l’instant, j’en ai 4), ça vous coûtera grosso modo 130 euros pour obtenir à 100 % UN enchantement du niveau maximum. Bien sûr vous pouvez outrepasser ça en passant par l’autel des ventes. Autel dont la monnaie est une monnaie achetable… Bref, c’est un peu le serpent qui se mord la queue.
Vous voulez essayer de vous rattraper avec le système de craft ? On a l’impression ici de jouer à un jeu sous navigateur (ou à Star Wars the Old Republic, au choix) avec des métiers qui se montent en cliquant sur un simple bouton, la seule chose que cela va vous coûter c’est du temps. J’ai arrêté quand les craft commençaient à demander 18 heures pour se compléter, et j’avais fait la moitié des points. Encore une fois ici vous l’aurez deviné, en payant, ça va plus vite ! Et avec des chances de succès augmentées.
L’enchantement Tenebrous (celui que je devais mettre 9 fois sur mon stuff) dans sa version greater. Au cours actuel du Zen, ça fait un peu plus de 2000 par enchantement. Pour rappel, 3000 zen c’est 25 euros. Je vous laisse faire le calcul pour enchanter un stuff complet. L’autre solution est d’essayer d’abuser du système et de spéculer pour s’équiper.
Voilà pour ce petit survol de l’univers free to play, pendant ces trois semaines on a pu voir à quoi ressemblait un cash shop, et surtout comment ils servaient. Sur LoL on a un bon jeu qui est porté par son modèle économique non intrusif, mais très attrayant malgré tout. On peut aussi payer pour aller plus vite que les autres, mais dans une certaine limite. A l’inverse, avec Neverwinter on a aussi un bon jeu, avec un passage par la case cash shop non seulement obligatoire, mais qui en plus ne connaît aucune limite. La perméabilité des différents types de monnaies nuisant totalement à l’expérience de jeu, si vous êtes un joueur compétitif. Néanmoins, je vous conseille tout de même le jeu, qui si il n’est pas parfait, offre quand même de très agréables moments. Les donjons sont propres, et le jeu est story driven (ici encore, à la SWTOR, mais le bon côté cette fois). Occultez totalement le end game, et pensez au jeu comme une expérience solo sympathique, avec des donjons en coopératif. Même si j’ai été totalement dégoûté par l’usage du shop, j’ai au moins passé un bon moment dessus. Le F2P a le vent en poupe, et ce n’est pas prêt de s’arrêter. Comme dans tous les domaines, l’excellent côtoie le nauséabond, à vous de savoir faire le tri en fonction de ce que vous cherchez sur un jeu. Et il faut bien garder une chose à l’esprit, au fond, même le plus gratuit des free to play ne le sera jamais vraiment. Si le jeu vous plaît vraiment, vous y dépenserez de l’argent, et en étant ravi de le faire en plus.
Ortie