Divinity Original Sin
Cette semaine, un jeu dont je commence à vous parler depuis maintenant un paquet de temps. Divinity : Original Sin, un cRPG dans la plus pure tradition, développé par Larian Studios (déjà responsable de précédents opus se passant dans le même univers, la saga Divinity). Un jeu qui a eu droit à une campagne Kickstarter couronnée de succès, en cours de développement. L’un des rares jeux ou j’ai payé pour pouvoir avoir droit à un early access (à côté d’un très décevant Scrolls, d’un sympathique Solforge et d’un futur Pillars of Eternity). Un jeu où je déroge quelque peu à ma règle, puisqu’il s’agit d’un jeu que je n’ai toujours pas fini, et qu’il est peu probable que je finisse dans un futur proche. Cependant, c’est un jeu sur lequel je pense avoir suffisamment de temps pour m’en faire un avis probablement définitif. Sans plus attendre, une review en demi-teinte d’un titre que j’aurai vraiment aimé pouvoir plus apprécier.
Le Gameplay
Comme je l’ai déjà mentionné, Divinity : Original Sin est un cRPG dans la plus pure tradition. Se faisant, il se pose comme un digne héritier des jeux Black Isle. Un groupe de quatre personnages dont vous devrez gérer la création de deux d’entre eux. Les possibilités sont très nombreuses, le système de jeu étant particulièrement ouvert à ce niveau-là. Vous répartissez des points dans un certain nombre de caractéristiques qui vous servent à déterminer quel type d’équipement vous porterez, et vous choisissez des compétences qui déterminerons les capacités que vos personnages pourront utiliser. Ainsi, si le jeu vous propose un certain nombre d’archétypes classiques (le quatuor guerrier/mage/voleur/prêtre et tous les hybrides de ce spectre), libre à vous de vous lâcher et de faire un peu ce que vous voulez. A ça, vous pourrez encore adjoindre un système de traits (avec bonus et malus), venant renforcer un peu votre personnage. L’avantage d’un tel système est que vous pourrez changer du tout au tout en cours de partie, partir d’un mage pour en faire par exemple un archer. Le désavantage (et c’est purement subjectif), c’est qu’en faisant ainsi, on a un système un peu trop bâtard qui n’offre pas la flexibilité d’un Skyrim, ni l’identité forte d’un système de classe à la D&D. C’est peut-être un détail pour vous, mais pour moi ça veut dire beaucoup ! Une fois passé cette création qui, j’en suis sûr, devrait déjà vous occuper un paquet de temps, on se retrouve propulsé sur une plage et son donjon servant de court tutoriel, et on commence l’aventure.
Dès les premières secondes on se rend compte que le jeu a été pensé avec le multijoueur en tête. Le jeu repose tout entier sur la coopération, la répartition des tâches. Et ce jusque dans les dialogues, où pour une fois ce n’est pas au personnage de prendre l’intégralité des décisions. Vous aurez même parfois droit à une partie de pierre/feuille/ciseaux en guise de mini-jeu pour prendre l’ascendant sur une conversation. Rigolo la première fois, très relou par la suite. Le problème principal, c’est que tout ça se montre un brin clunky lorsqu’un seul joueur doit prendre le contrôle de l’intégralité. Le pathfinding est capricieux, chose courante dans le genre, mais qui ici se montre particulièrement énervante au vue de l’importance des effets environnementaux sur vos personnages (j’y reviens plus tard). Pour faire très simple, disons qu’un simple faux pas peut tuer ou endommager lourdement l’un de vos personnages, parce qu’il a posé un demi-orteil à un endroit où il n’aurait pas dû. Devoir prendre un chemin un peu étriqué entre deux zones de flammes au sol peut se montrer assez rapidement frustrant. Lorsque vous jouez seul, vos quatre personnages sont reliés entre eux, ils se déplacent en groupe. Cliquez sur l’un d’entre eux le fait passer devant dans votre formation, faisant ainsi faire tout un tas de mouvements inutiles à votre troupe. Lors de passages délicats, la solution la plus safe est alors de dissocier chacun de vos personnages du groupe, leur faire passer l’obstacle un par un, et ensuite les relier de nouveau entre eux. En bref, c’est chiant et ça frustre de devoir passer autant de temps pour une tâche aussi triviale. Et ce sera le cas pour beaucoup d’éléments du gameplay. En gros : jouez avec un pote, et tout cela se montre infiniment plus agréable.
Un mot enfin sur le système de combat du titre. En cours de développement, le jeu est passé d’un système de pause active à un système purement tour par tour, ressemblant furieusement à celui d’un Fallout (gérer un pool de points d’actions qui détermine tout ce que votre personnage peut faire dans un tour donné). Certains préfèrent, d’autres moins. Quoiqu’il en soit c’est un aspect du jeu qui a été relativement soigné, et où la coopération et l’interaction ont encore une fois été poussées. Le jeu repose sur un système d’éléments qui vous offre un tas de possibilités rigolotes. Une flèche de feu sur un bidon d’huile, ou dans un nuage de gaz et vous créerez une explosion. Un éclair sur une étendue d’eau et vous électrocuterez une zone… Les possibilités sont nombreuses, c’est marrant, et ça ajoute une petite couche supplémentaire au système de jeu. Loin d’être simplement anecdotique on retrouve ce système d’éléments dans plein d’aspects du jeu. Pas grand-chose à dire là-dessus, c’est un aspect du jeu très soigné. Le seul reproche que j’ai à faire sur un système tour par tour (en opposition à la pause active), c’est que ça a tendance à rallonger artificiellement la durée de vie.
Pour boucler le tout, on peut encore rajouter au jeu un système de craft assez riche, mais bordélique. La gestion sommaire d’un domaine que vous obtiendrez assez rapidement. De la télékinésie qui vous permet de bouger tout un tas d’éléments de décors. Et enfin des compagnons de route qui sont peu nombreux (un grand total de quatre depuis un patch récent, vous n’en disposiez que de deux à l’origine), et au final assez transparents. Ça a été corrigé légèrement avec la dernière génération, mais globalement on comprend quelque chose assez rapidement : vos deux personnages principaux SONT les personnages principaux, les autres ne sont que des faire-valoir, des sidekick rigolos qui viennent diversifier votre groupe. Il me paraît aussi nécessaire de mentionner un dernier point : le jeu ne vous prend pas par la main. Vous allez en chier si vous voulez avancer dans vos quêtes, vous allez devoir lire de nombreux dialogues et fouiller pour trouver vous-même des indices. Ça risque de déconcerter du monde, ce type de design étant de moins en moins courant. En revanche, on en tire une fierté accrue à la moindre petite réussite ou avancée : la sensation d’avoir réussi quelque chose soit même, au lieu de suivre une flèche jaune sur votre minimap.
Le fameux système d’argumentation, assez vite lassant.
La réalisation
J’ai déjà empiété un peu sur cette partie, mais je vais quand même faire l’effort de me répéter : le jeu est plutôt clunky. Tout a été pensé pour le multijoueur, et ça se sent un peu trop quand on joue seul. En dehors de ça, il faut aussi compter sur quelques problèmes de caméra particulièrement étonnants pour le genre (difficulté pour cibler quelque part par moment lorsque deux éléments sont très proches). On a aussi le droit à des temps de chargement particulièrement longs, mais fort heureusement pas si nombreux que ça. Le côté un peu bordélique de diverses parties de l’interface risque aussi d’en rebuter certains. C’est loin d’être un drame, mais pour un titre où l’interaction et l’exploration sont reines, c’est un peu dommage de se retrouver parfois bloqué par un dialogue qui a disparu de l’écran au profit d’un autre, d’un élément de décor sur lequel on n’arrive plus à cliquer (en raison d’une hitbox minuscule). Dans le même genre d’idée, on notera la gestion de l’inventaire qui n’est clairement pas adaptée à un jeu ou tout est ramassable.
Voilà, c’était pour les défauts. Pour le reste, graphiquement le jeu adopte un style cartoon plutôt agréable à l’œil et un moteur plutôt propre. Les moddeurs de tout poil seront ravis d’apprendre qu’un kit de développement est entièrement à la disposition des joueurs, et on trouve déjà quelques mods sympathiques qui devraient assurer au jeu une durée de vie plus qu’honorable. Les effets visuels et environnementaux (au cœur du jeu) sont très bien rendus, au point qu’on prend un malin plaisir à vouloir faire exploser ou électrocuter à peu près tout ce qui peut l’être pour pouvoir profiter de l’effet visuel. On a globalement l’impression d’être face à un jeu très propre, un jeu fini. Et c’est clairement un bon point, surtout pour un jeu issu du financement participatif (dont on connaît les déboires, et sur lequel j’écrirais probablement un billet, un jour…).
Le souci du détail sur ce jeu est assez impressionnant, tous les PNJ que vous croiserez ont droit à des lignes de dialogues (animaux compris, si vous avez le bon trait). Ces derniers vaquent à leurs occupations, se baladent, discutent avec d’autres, bref ils vivent. Encore une fois, c’est très agréable, et ça renforce l’immersion dans ce monde tout coloré. On retrouve la même finition sur la bande son qui est probablement la plus riche que j’ai pu entendre depuis moult années. La quantité de musiques est tout bonnement ahurissante, elles « bouclent » beaucoup moins que dans une majorité de titres, et c’est fort appréciable. Les bruitages ne sont pas en reste, et vous en prendrez également plein les oreilles. Petit bémol par contre pour les doublages qui sont de qualité, mais qui sont un peu trop faibles en nombre.
Un environnement que vous ne croiserez pas tout de suite, mais avouez tout de même que ça flatte la rétine.
Le setting
L’univers Divinity n’en est pas à sa première itération, on a eu déjà eu droit à du RPG, de l’action RPG, et même un jeu de stratégie avec des passages à la première personne (Divinity Dragon Commander, un titre agréable mais pas inoubliable). On a donc droit à un univers médiéval fantastique très riche, à la magie omniprésente et dans lequel on retrouve pas mal de poncifs du genre : orcs, dragons et compagnie, vous ne serez clairement pas dépaysé. C’est d’ailleurs peut-être un reproche que l’on peut faire à l’univers de Rivellon, c’est de manquer un peu d’originalité. Les plus curieux d’entre vous pourront lire les nombreuses ressources disponibles à la fois dans les différents jeux du studio, ainsi que sur divers wiki. Mais en gros, on a du grand classique : plusieurs dizaines de millier d’années de préhistoire, quelques centaines d’années d’un âge médiéval décrit en abondance avec ce qu’il faut de guerres, d’avènement du Chaos et autres révélations divines. En bref, c’est bien ficelé, mais ça manque clairement d’originalité : vous êtes un Source Hunter, ordre d’enquêteur profane chargé de représenter les forces du bien, qui doit résoudre un paquet de problèmes dans un bled où la vie n’est pas aussi tranquille qu’elle en a l’air. On a vu mieux comme pitch de départ.
Là où la saga tire son épingle du jeu, c’est sur son humour omniprésent. En particulier depuis Beyond Divinity, en 2004. Le scénario de cet épisode a été écrit par une certaine Rhianna Pratchett, la fille du papa du Disque-Monde, univers bien connu des nerds en tout genre. Loin de n’être qu’un faire-valoir, elle est à l’origine du scénario de quelques titres qui ne vous seront (j’en suis sûr) pas inconnus. En vrac on peut citer les deux Overlords, la dernière itération de Tomb Raider et aussi Mirror’s Edge. Son influence se ressent toujours aujourd’hui sur la série de Larian Studios, où on a droit à un humour particulièrement tenace. Le jeu multiplie les situations et les dialogues tous plus croustillants les uns que les autres. En plus de votre mission principale, où il est question de meurtres occultes, vous aurez le droit d’essayer de rabibocher un chat avec sa promise, de vous découvrir un ami canin qui apprécie particulièrement l’odeur de vos pieds ou encore d’essayer de déjouer les magouilles d’un Madoff local. Vous ne vous ennuierez clairement pas au cours de l’aventure, mais on peut tout de même reprocher un certain manque d’envergure au scénario. Ça manque de l’envolée épique que l’on retrouvait dans les opus précédents, et qui faisait le charme d’un Baldur’s Gate.
J’aurai beaucoup de choses à dire sur l’univers et le scénario de ce jeu. Mais ce dernier est une réelle invitation à l’exploration, aussi je ne vous dévoilerai rien de plus. Un simple conseil pour finir : explorez, cliquez, lisez tout ce qui vous passe sous la main. Essayez de penser en dehors des limites du jeu, et profitez de son ambiance. Ça en vaut le coup.
Avec le talent Pet Pal, vous pourrez parler aux animaux. Et croyez moi, ce n’est pas juste accessoire.
Divinity Original Sin, un jeu qu’il est bien. Si vous êtes un fan absolu du genre, c’est un incontournable. Si vous aimez les RPG et que vous cherchez un titre à faire en coop, ce jeu est fait pour vous. En revanche, seul, on a tendance à un peu trop s’attarder sur les quelques défauts énervants du titre, et c’est fort dommage. Il est probable que j’y replonge seul régulièrement, mais clairement, si vous voulez en exploiter le plein potentiel, jouez y à plusieurs. Ainsi faite, l’expérience est sans doute l’une des plus plaisantes du genre.
Ortie