Des maux bas…
Cette semaine devait à l’origine être une review de Final Fantasy XIII. A l’évidence, ça n’arrivera pas. J’ai passé une petite semaine loin de mon chez moi, je rejoue à WoW, un nouveau Civilization est sorti… Bref je n’y ai pas touché autant que je l’aurai voulu. Du coup, un changement de sujet était inévitable, et ça a fini par s’imposer à moi : le MOBA. Un genre de jeu sur lequel la planète semble passer bien trop de temps puisqu’il s’agit du genre le plus joué en ligne (et de très loin). Aujourd’hui on va essayer de savoir ce qui se cache derrière mon jeu de mot pourri ainsi que cet acronyme un peu barbare.
Je risque de me répéter un peu sur l’introduction, mais on va dire que c’est la dernière fois que je tâche de présenter le genre. MOBA, pour Multiplayer Online Battle Arena. En gros, on enferme un tas de gens dans un espace restreint et on les laisse se taper dessus. Si on se contente de ça, on peut faire entrer un paquet de jeux dans la catégorie. Le terme a été relativement répandu par Riot Games, les géniteurs de League of Legends, et il faut avouer qu’il est facile à retenir. Les alternatives étant ARTS pour Action Real Time Strategy (chiant à prononcer, pas assez catchy) et DotA-like (pas génial de qualifier son jeu de DotA-like quand on cherche à imposer sa propre franchise). Du coup, on va se contenter de MOBA pour le reste de l’article.
Le genre est apparu dans un premier temps sous la forme d’un mod pour le jeu de stratégie Warcraft 3 de Blizzard (en vrai on en trouve quelques traces avant, mais on va faire comme si ce n’était pas le cas), et a fini par devenir mondialement connu sous le nom de DotA:Allstars. C’était en quelque sorte un best of de tous les différents mods du genre, sous la houlette d’un certain Guinsoo. De mise à jour en mise à jour, c’est un certain IceFrog qui finira par récupérer le bébé. Le genre commençant à prendre un certain succès, un joyeux bordel a commencé à se produire : des nouveaux titres ont fait leur apparition. Certains studios ayant décidé de se lancer dans l’aventure, à commencer par Gas Powered Games avec le très médiocre Demigod (dont l’unique qualité était sa direction artistique, cf l’image de présentation). Et c’est là que les joyeusetés commencent : Guinsoo va se retrouver à bosser chez Riot Games qui va alors sortir League of Legends, jeu qui deviendra un succès mondial (jeu en ligne le plus joué en 2013 et 2014). De son côté IceFrog se fait embaucher par Valve pour créer son propre MOBA du nom de DotA 2. Le problème c’est que Blizzard voulait également sa part de ce généreux gâteau, et envisageait de lui-même sortir une suite au désormais ancestral DoTA:Allstars. Quelques batailles juridiques après ça, Valve finira par récupérer la propriété intellectuelle de DotA 2, et Blizzard par renommer son projet Heroes of the Storm, alors qualifié de « hero brawler ». Entre temps, une pelletée de titres du genre est sortie. Pourquoi je perds du temps et des lignes à vous résumer une page Wikipedia ? Parce qu’à mon avis, pour bien comprendre le genre, il faut en comprendre la genèse. Il s’agissait à la base d’un seul projet qui avec le temps et les designers successifs a fini par se scinder en deux gros jeux, LoL et DotA 2, entre lesquels une multitude de développeurs essayent de se faire une place, entre l’accessibilité du premier et l’élitisme du second. C’est bien simple, à l’heure actuelle tout le monde essaye de sortir son propre jeu, à l’image des MMORPG qui pullulaient il y a quelques années.
Voilà un titre qui aurait pu sortir, mais qui finalement deviendra Heroes of the Storm, regroupant des personnages des multiples licences de Blizzard.
Au fond, la recette de base est très simple : on prend un univers ou un thème riche, à même de fournir un paquet de personnages, on copie la recette DotA en faisant varier légèrement le gameplay, on y ajoute sa touche perso et paf ! Vous avez un jeu. Que ce soit Nosgoth, encore en beta et basé sur la vieille licence Legacy of Kain, SMITE avec sa vue à la troisième personne et ses références à la mythologie, Infinity Crisis sous licence DC Comics, Adventure Time Party jouable sous navigateur et inspiré de la série éponyme… les titres sont légion. Et j’ai joué à absolument tous. La constante est la suivante : deux équipes qui vont s’affronter sur une carte symétrique avec pour but de détruire – ou de prendre possession – d’un point de contrôle. A cela il faut ajouter la présence d’un certain nombre d’autres entités contrôlées par l’IA et qui agiront toujours suivant un pattern prédéterminé. Elles sont uniquement là pour servir de chair à canon pour les joueurs et leur donner une ressource primordiale de ce type de jeu à savoir des points d’expérience et/ou une monnaie quelconque permettant d’acheter des objets pour améliorer son avatar. A ce titre, le MOBA lorgne énormément du côté du jeu de rôle. La différence est qu’une fois la partie finie, toute cette progression est perdue et vous repartirez de zéro pour la suivante. Tout cela donne donc des parties dont la durée tourne généralement autour de la demi-heure. Et c’est là l’une des grandes forces du genre. De plus, contrairement à ce qu’on pourrait croire, ce type de jeu est au final assez peu demandant d’un point de vu physique. Comprenez par-là que vous n’avez pas besoin de réflexes de Jedi ou d’aligner 300APM pour sortir du lot. Vous ne contrôlez qu’un seul personnage, vous n’avez pas besoin de gérer toute une armée ou même la gestion de votre base. Vous vous concentrez en général sur la gestion de votre personnage. La partie mécanique du genre s’apprend relativement vite, la différence entre un joueur décent et un très bon joueur résidant surtout sur la connaissance du jeu, du metagame et sur du décision making. Quelque chose qui devrait ravir les fans de stratégie sans effrayer ceux qui auraient peur de se faire submerger par le nombre de choses à faire, puisque encore une fois : vous ne contrôlez qu’un seul personnage.
Un MOBA qui a la particularité de présenter un gameplay en 2D, et l’un des très rares représentants du genre que les joueurs console ont eu le plaisir de goûter.
Deux équipes qui s’affrontent dans des parties d’une trentaine de minutes, une très grosse part de stratégie et un peu de chance. Un format taillé pour la compétition, et cette dernière atteint des sommets dans le genre. Nous en sommes à la 4ème saison pour LoL qui cette année avec son championnat du monde nous a proposé : un prize pool de plus de 2 millions de dollars, une finale jouée dans le gigantesque stade de foot de Séoul, suspension de joueurs et autres drama, en bref du grand spectacle. DotA 2 n’a absolument pas à pâlir en comparaison avec son International 2014 et son prize pool total de plus de 10 millions de dollars (un record dans l’eSport), et son incroyable couverture médiatique, notamment sur la chaîne ESPN. A titre informatif, la finale des worlds de LoL a cette année attiré 32 millions de webspectateurs (si jamais, vous avez lu cette expression ici en premier !) ce qui pour quelque chose d’aussi confidentiel qu’une compétition de nerds est tout de même relativement impressionnant. C’est quelque chose de génial pour la visibilité et surtout la crédibilité d’un loisir qui reste même encore aujourd’hui un brin marginalisé. La raison d’un tel engouement est relativement simple : ce sont de bons jeux, faciles à comprendre et durs à maîtriser. En plus de cela ils bénéficient d’un suivi régulier et d’ajouts conséquents venant renouveler l’expérience de jeu aussi bien que le metagame. De quoi scotcher des dizaines de millions de joueurs pendant un paquet d’heures.
Non, c’est pas un concert ni un discours de Saruman, juste 10 nerds en colère qui vont se taper dessus à coup de pixels.
Voilà, on approche de la fin et au fond je n’ai pas dit grand-chose à part que : le MOBA c’est bien. Mais c’est pas grave, parce que c’est ce que je voulais essayer de vous faire comprendre. C’est un genre qui est incroyablement riche et profond et qui est pour moi un exemple de game design. Alors oui, ça peut sembler cryptique au début. La quantité d’informations à encaisser peut faire peur et la communauté de ces jeux n’a rien à envier au /b/ de 4chan (comprendre par-là : ce qu’internet fait de pire). Mais il serait vraiment dommage de s’arrêter à ça tant les qualités de ce type de jeux sont nombreuses. Au fond, qu’avez-vous à perdre si ce n’est un peu de temps ? La plupart d’entre eux sont gratuits. Jouez à LoL, à DotA ou à d’autres, coupez totalement le chat et essayez juste d’apprécier ces jeux pour ce qu’ils sont : de vrais bons jeux totalement addictifs desquels vous avez sans doute beaucoup à apprendre.
Ortie